Question un peu provocatrice je dois bien l'avouer mais c'est hélas un constat implaccable. Alors que la moyenne d'âge des joueurs est de 35 ans, on a toujours cette impression que nous grandissons, vieillissons mais que les jeux stagnent inlassablement dans la médiocrité scénaristique, incapable de proposer une aventure ambitieuse, un scénario un minimum construit, tout semble se baser sur "avance, tir et on t'expliquera pourquoi".
Le RPG : Sauver le monde
Un héros orphelin, un peu marginal, rebelle ou bien timide, se voit tout à coup, l'élu capable de détruire une armée de monstres, des méchants sans scrupules qui profitent de la misère, et qui en plus doit délivrer la fille du roi gentil retenue en otage dans les griffes de l'instigateur machiavélique de toute cette trame qui doit mener bien entendu à la destruction du monde.
Allez, on doit être à 90% des scénarios de RPG japonais.
On peut prendre par exemple la série la plus connue Zelda, depuis 25 ans, on incarne le héros d'Hyrule qui doit sauver une princesse d'un méchant qui souhaite détruire le monde, ça n'empêche pas les joueurs de se ruer à chaque sortie alors qu'on sait exactement ce qu'il va se passer d'un bout à l'autre.
Action/Aventure : Se venger
Ryse, Red Dead Redemption, Max Payne, Castelvania, Dishonored, God of War, je pourrais continuer la liste pendant un bon moment.
Pour faire simple, le héros doit se venger, il a perdu dans 95% des cas sa fiancé, sa femme, ses enfants, quoi de plus simple qu'en mettant en place la trame tournant autour d'un drame familial qui entraîne une vengeance, on traverse donc des niveaux en tuant tous les méchants qui nous ont fait du mal, entrecoupés de cinématiques qui reviennent dans le passé des bons moments vécus tous ensemble, aujourd'hui, tout n'est plus que sang et solitude...
Dans RDR, John Marston veut se venger de son ancien gang
Dans Assassin's Creed, Altair va se venger de la multinationale qui veut changer le monde
Dans Max Payne, Max va se venger des méchants qui ont tué sa femme et son fils.
Dans God Of War, Kratos va se venger des dieux qui l'ont poussé à tuer sa famille
Dans Dishonored, Corvo va se venger de ceux l'ayant accusé du meurtre de la dauphine dy royaume.
FPS : Tuer des terroristes qu'ils soient russes, "arabes", on s'en fiche.
Là, on fait encore plus simple, on va quand même pas mettre en place un scénario dans un jeu de tir à la première personne, des méchants très méchants, caricaturés avec le méchant qui a toujours une cicatrice parce qu'à l'heure des balles et guerre nucléaire, le méchant a toujours combattu au corps à corps et s'en est sorti.
Il serait idiot d'énumérer la longue liste utilisant ces ficelles, prenons juste le plus emblématique, Call of Duty Modern Warfare, des méchants du Moyen Orient veulent utiliser la bombe nucléaire pour tuer des gens, l'excuse est toute trouvée pour dégommer tout ce qui bouge, pour pas dire autre chose...
Les scénarios faussement ambitieux :
Metal Gear, Bioschock, The Last of Us, Fahrenheit, Heavy Rain, combien de jeux étaient annoncés comme au dessus de la moyenne, mais comme on parle de jeux vidéo, on se retrouve avec un pétard mouillé ?
Le plus symptôme pour moi de l'escroquerie intellectuelle qu'on nous sert pour des jeux qui se veulent "recherchés" est sans aucun doute Heavy Rain. David Cage se veut à part, faire du jeu vidéo, une porte d'entrée vers le grand cinéma intéractif, il accouche de Heavy Rain en 2010 sur PS3. Quel intérêt de proposer un thriller intéractif si le scénario n'a aucun sens et que le véritable tueur en série est Scott Shelby, un enquêteur privé désoeuvré qu'on joue parmi les autres personnages. Pour justifier cette énormité, on va créer une enfance toute faite, alors qu'on mène l'enquête et qu'on a à faire à un tueur sordide, méticuleux, qui fait des origami, l'initiateur se veut être le gros détective tout dégueulasse. Si le scénario ne tient pas du tout c'est que David Cage ne doit rien laisser transparaître du personnage, on atteint la limite de l'exercice, puisque même seul, Scott Shelby fait comme s'il était un gentil détective, ça n'a aucun sens tout simplement.
Metal Gear est aussi ce qui se fait de plus bête en matière de pseudo jeu vidéo avec un scénario aux petits oignons, mais il fait tellement dans la surenchère et le cul cul la praline avec une morale pour enfant de 10 ans sur les méfaits de la guerre et le risque du nucléaire. Si on rajoute les incohérences engendrées par la sortie d'un nouveau MGS, on se retrouve avec un mix de tout ce qui fait le mauvais goût en matière de scénario vidéoludique.
Bioschock est également maître dans ce qui peut être le plus frustrant pour un joueur, pourtant il a toute les cartes en main avec un background exceptionnel, une ambiance unique.
Jack, rescapé d'un crash, on débarque dans le monde crée Rapture par Andrew Ryan, tout est magique, sauf, sauf, sauf, la voix d'Atlas. Et là tout s'écroule, car n'importe quel individu ayant passé un peu de temps à lire de bons romans, comprend très vite que notre personnage est manipulé à travers la découverte de Rapture, là encore, le jeu vidéo atteint ses limites, puisqu'on est obligé de "subir" alors qu'on a compris qu'on servait Atlas, extrêmement frustrant pour le joueur.
Les rares exceptions :
Je vais commencer par la catégorie FPS et prendre Spec Ops The Line, on ne se retrouve pas en pleine guerre mais après, on parcourt alors les niveaux avec des personnages écoeurés des massacres, l'horreur des gaz chimiques, des tortures, l'expérience de jeu se veut unique dans le genre.
Alan Wake :
Alors bien sûr, ce n'est pas un chef d'oeuvre, mais le speech se veut vraiment atypique pour le secteur du jeu vidéo, pas besoin de broder, voici la trame :
"Alan Wake est un auteur à succès de thriller policier. Mais, depuis deux ans, il souffre du syndrome de la page blanche. Sa femme Alice décide alors de l'emmener en vacances dans la paisible ville de Bright Falls afin, espère-t-elle, qu'il puisse retrouver l'inspiration et écrire un nouveau livre. Mais lorsque sa femme disparait, le dernier roman d'Alan, un livre d'horreur qu'il ne se souvient pas avoir écrit, prend vie et une force obscure (l'Ombre) prend possession de la population et de tout autre objet. Alan tente de retrouver sa femme et comprendre ce qui lui arrive. "
Sanitarium : Le plus marquant
Se réveiller dans un asile de fou et chercher qui on est, ça tient en quelques mots et pourtant ce jeu sera marquant pour tous les joueurs justement grâce à ces lignes, une quête identitaire qui amène le joueur en plein cauchemar.
Vous l'aurez compris, les jeux vidéo n'ont pas évolué dans leur scénario selon moi depuis 30 ans; à presque 33 ans, aucun scénario me transporte véritablement, avec cette impression que les développeurs imaginent le joueur comme un ado de 14 ans qui n'a jamais été à l'école, ouvert de livre, était au cinéma, reprendre toujours les mêmes ficelles, le backgroung et le "Ouais c'est beau" suffiront à remporter tous les suffrages.
J'écris ces lignes en espérant me tromper et attends beaucoup des prochaines sorties, je me souviens avoir déliré sur la fin de Divinity II par exemple, ému comme un abruti sur le final de FFX, je suis quand même un minimum bon client, mais les graphismes sont loin d'être mon premier critère, peut être une erreur ?